mercoledì 14 aprile 2010

Beauvoir and Sartre, les amants terribles


Beauvoir and Sartre, les amants terribles
LE MONDE DES LIVRES


OUS SAVEZ, je ne dis pas tout au Castor", chuchotait Sartre à Michelle Vian, trois ans avant sa mort. Ils sont encore liés, et elle lui apporte, en secret, des bouteilles de whisky qu'il cache dans sa bibliothèque. Transparence ou opacité, radicale liberté ou obscénité paradoxale du mensonge généralisé, autant de questions que pose le livre d'Hazel Rowley, Tête-à-Tête, paru en octobre aux Etats-Unis (1). Il ne s'agit pas d'une biographie, mais, comme le titre le New Yorker, d'un récit de l'"étrange liaison" qui unit, pendant plus d'un demi-siècle, Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir. Et peut-être cette liaison n'est-elle, en fin de compte, jamais apparue si étrange, si fascinante, ni si française, que sous les feux de la critique américaine.


"Les anciens amants font place aux nouveaux, en si grand nombre et si rapidement, que le lecteur se sent engourdi, médusé et plus qu'un peu nauséeux. Beauvoir et Sartre, si critiques quant à l'hypocrisie bourgeoise, la rendent plutôt sympathique en regard de leur propre comportement", commente le critique du New York Times, William Grimes. Et Louis Menand de renchérir dans le New Yorker : "Il semble juste de dire que, quoique libre d'esprit et dénuée de pruderie, Rowley est horrifiée par le comportement qu'elle décrit."

Ce n'est pas si certain. Le récit de Rowley est sobre, ramassé, parfois elliptique, toujours informatif et informé. Cette spécialiste de Beauvoir, titulaire d'un doctorat sur "L'autobiographie existentialiste", a rassemblé témoignages, entretiens et lettres inédites pour reconstituer ces fragments d'un pacte amoureux qui, tant par sa singularité que par son occasionnelle cruauté, semble décidément interloquer l'Amérique d'aujourd'hui.


JALOUSIES ET MENSONGES


Tout faire, mais pour tout se dire ? Ou réinventer, peut-être, une stratégie de la vérité qui ne soit plus celle des "salauds" et des "bourgeois" ? Le livre raconte les Olga, Wanda, Bianca, Nathalie ("J'ai un goût très prononcé pour son corps", écrit Beauvoir), convoitées par l'un et l'autre. Il dit, aussi, les liaisons transatlantiques, les mimétismes, les jalousies, les mensonges. Lorsque Olivier Todd demande à Sartre comment il s'en sort avec ses femmes, l'auteur des Mots répond : "Je leur mens ; c'est plus facile, et plus décent." "Même au Castor ? insiste Todd. Particulièrement au Castor."

Ce qui paraît perturber les lecteurs du récit de Rowley, c'est bien cela : l'"hypocrisie" de "l'apôtre de la transparence", sa propre mauvaise foi et, vis-à-vis des autres, cette manie de singer les sentiments pour mieux railler ensuite. Quant à Beauvoir, les contradictions entre Le Deuxième Sexe et sa vie restent ce qui, de ce côté-ci de l'Atlantique, déroute le plus : son homosexualité passée sous silence, et toutes ces femmes financièrement dépendantes, intellectuellement soumises, autant de petits pantins graciles...

La vérité, mais pas toute. Un sentiment amoureux qui, suggère au fond le livre, reste opaque à toute économie morale. "O charme de mon coeur et de mes yeux, pilier de ma vie, ma conscience et ma raison. Je t'aime si passionnément, et j'ai besoin de toi." C'est Sartre dans une lettre à Beauvoir, en juillet 1938. Tout est dit. .

(1) Tête-à-Tête. Simone de Beauvoir and Jean-Paul Sartre, HarperCollins. Cet ouvrage sera publié en France par Grasset

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