lunedì 5 aprile 2010

LES ENREGISTREMENT SECRETS

D'APRES RUE89


Hillary, Monica, Maison Blanche : le confident de Clinton se confie
Par Hubert Artus

Alors que Bill Clinton planche encore sur son prochain livre, l'historien Taylor Branch publie sa version de huit ans d'entretiens avec l'ancien président américain, alors à la Maison Blanche. Interview.
Taylor Branch et Bill Clinton sont deux hommes du Sud des Etats-Unis. Ils ont aussi en commun d'avoir collaboré à la campagne de George McGovern au Texas en 1972 :

•l'un deviendra gouverneur de l'Arkansas et président des Etats-Unis, parcours jalonné d'histoires de femmes, de Gennifer Flowers à Monica Lewinsky.
•l'autre deviendra journaliste, historien, et prix Pulitzer 1988 pour le premier tome d'une trilogie de référence : « Parting the waters : America in the [Martin Luther] King Years », retour sur la période 1954-1968.
Un dictaphone à la Maison Blanche

C'est Bill Clinton qui, dès le début de son mandat, demande à Taylor Branch d'être celui à qui il se confierait. Autour de conversations régulières, et enregistrées.

L'exercice est périlleux : depuis 1973 et les enregistrements secrets (connus de beaucoup, imaginés par Ellroy, mais révélés l'an dernier) qui coûtèrent son poste à Nixon, tout dictaphone est devenu à la Maison Blanche un objet aussi suspect qu'un cutter dans un aéroport. Il arrivait même à Clinton de planquer dans ses chaussettes les cassettes enregistrées avec Branch.

Entre 1993 et 2000, Taylor Branch vient régulièrement à la Maison Blanche. Le plus souvent la nuit, quand Clinton essaie de faire le tri entre préoccupations, dossiers et urgences. Et entre deux micro-sommeils, se confie. Résultat : soixante-dix neuf cassettes. Que l'ancien président conserve toujours.

Pas de bombe, pas de scandale sexuel
Publié à l'automne dernier aux Etats-Unis, dans une version plus longue que la version publiée à l'étranger (qui contient des discussions de pure politique intérieure, moins opportune pour le public non américain), « Bill Clinton, les enregistrements secrets » n'est pas la retranscription de ces bandes, mais de celles que Branch enregistrait, seul dans sa voiture ou chez lui, en débriefing de leurs échanges.

Hillary Clinton étant toujours au pouvoir, Branch n'a pas pu trop en dire. Ni sur le scandale Whitewater, qui colle aux époux Clinton, ni sur le couple présidentiel, ni sur la diplomatie. Mais il a tenu à publier ce qu'il pouvait. Le geste n'a pas entièrement apprécié par l'ancien confident.

Ni bombe ni révélation, mais un témoignage d'Histoire sans piédestal : les récriminations mutuelles entre Gore et Clinton suite à la défaite de 2000. Les larmes sur Yitzhak Rabin, le bourbier bosniaque, les homosexuels dans l'armée.

Et quelques cocasseries fumantes : Boris Eltsine bourré, en caleçon devant la résidence des hôtes officiels, hélant un taxi pour aller… s'acheter une pizza, le tout devant des gardes qui ne le reconnaissent pas.

Interview

Quelle a été la réaction du couple Clinton à la parution du livre ?

Je n'en ai pas parlé à Hillary Clinton, car elle est trop occupée comme secrétaire d'Etat.. Bill, lui, m'a dit que c'était quand même inapproprié de faire parler sa femme comme je la fais parler dans le livre [elle parle parfois avec des gros mots, ndlr]. Il est très protecteur avec sa femme et avec sa fille, donc cela ne lui a pas plu.

Que vous disait-il d'inédit, par rapport à ce qu'il disait dans la presse ?

Quand j'arrivais à la Maison Blanche, je ne savais jamais ce qui allait se passer. Il était souvent 22 ou 23 heures. Je ne savais pas dans quel état d'esprit j'allais trouver le Président. Par exemple, un soir où j'arrivais et où j'avais lu dans la presse que son principal dossier du moment était les impôts, il était en fait surtout préoccupé par Boris Eltsine, par la Bosnie, par le Moyen-Orient.

Les enregistrements duraient souvent deux heures. Durant lesquelles son humeur changeait. Il pouvait s'emporter, se fâcher, sur un dossier, puis sur un autre, laisser son esprit voyager. C'est alors qu'il s'autorisait à lâcher des paroles inédites.

Un soir, il m'a parlé longuement d'un sommet économique où se trouvait tout le G7 ainsi que le président vietnamien. On lui avait conseillé de ne pas parler à ce dernier. Mais pour la photo officielle, ils se sont trouvés côté à côté, car dans l'ordre alphabétique, « USA » et « Vietnam » se succédaient…

Du coup, ils ont eu une grande discussion où ils ont parlé de la responsabilité américaine dans la guerre du Vietnam. Clinton n'avait pas dit à la presse le contenu de la discussion, mais il a tenu à m'en parler pour que cela passe à la postérité.

Un des drames de la présidence Clinton, c'est de ne pas avoir eu sa loi sur la réforme du système de santé. Comment pensez-vous qu'il l'ait vécu ?

Clinton prenait les échecs avec philosophie, même s'il passait son temps à se demander pourquoi il avait échoué. Sur la question de la réforme du système de santé, il disait que tous les présidents américains avaient essayé de faire aboutir cette réforme. Il y a six mois, il m'a dit qu'il pensait qu'Obama, lui, y parviendrait…

Ce livre ne contient pas de bombe sur l'affaire Lewinsky, évoquée en trois chapitres seulement. Ne vous en a-t-il vraiment pas parlé ?

Ça a eu lieu vers la fin de sa présidence, en 1998, une période politiquement chargée pour lui. Nous ne nous sommes alors pas beaucoup vus. Et lorsque c'est arrivé, il n'avait pas le droit d'en parler, ses avocats le refusaient.

Et moi, ça me gêne de parler de la vie sexuelle : je n'amenais pas le sujet. Clinton, qui a une tendance naturelle à l'auto-apitoiement, disait cependant qu'il avait mérité ça. Et que ça allait ruiner sa présidence.
Que pensez-vous du couple Clinton ?

Tout le monde voit ce couple comme une perpétuelle guerre des ego, où l'un profite de l'autre pour arriver au pouvoir. J'ai connu la période où, humiliée, Hillary faisait dormir Bill sur le canapé. Mais j'ai aussi vu cette tendresse entre eux, cette chaleur. Je ne sais s'il y a passion sexuelle, mais pour moi ils restent un vrai couple.

Le plus étonnant, c'est qu'Hillary était convaincue que le procès en destitution n'avait aucune base. Pour elle, qui avait travaillé sur celui de Nixon en tant qu'avocate, il était anticonstitutionnel. Alors que Bill se disait que si, ça devait arriver… Pour sa femme, c'était une affaire strictement privée, et non un abus de pouvoir. Il devait donc rester président. En cela aussi, leur relation est très complexe, avant tout basée sur la politique, le pouvoir.

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